On sait que vous vivez désormais aux Etats-Unis. Vous êtes à Abidjan actuellement. Les raisons ?
Je suis à Abidjan parce que j’ai reçu une invitation de la Première Dame pour son gala qui aura le 01mars. La deuxième raison, c’est que je suis présentement à Abidjan pour renouveler mes papiers. Il y a les Jeux Olympiques qui arrivent et il faut donner les informations nécessaires pour les accréditations, surtout que je suis mariée maintenant et donc mon nom change. Je précise cependant que c’est toujours un plaisir pour moi de revenir au pays. Vous savez, quand vous êtes à l’extérieur, le pays vous manque. Du coup, je suis contente de revenir. Dommage je ne sois pas venue pendant la Can pour voir la beauté des stades et vivre l’ambiance.
Comment vous sentez-vous pour cette reprise après les vacances ?
Je me sens bien. En réalité, je n’étais pas vraiment en vacances parce que pendant les préparatifs de mon mariage, j’avais déjà repris les entrainements. Vous avez vu que je n’ai pas fait de ‘’lune de miel’’ parce que la priorité pour moi, ce sont les Jeux Olympiques. Dès que le mariage est fini, nous sommes repartis à notre base à Los Angeles pour pouvoir nous entrainer. Là, en ce moment je me sens bien dans ma peau. D’ailleurs, je me suis toujours sentie bien dans ma peau. Après, il y a eu des couacs pendant les compétitions. J’espère que cette année sera la bonne, qu’elle sera différente comme on le dit, il y a toujours de l’espoir.
On vous trouve en pleine séance d’entrainement au stade Félix Houphouët Boigny. Quel est le menu du jour ?
Vu que je suis arrivée le lundi (26 février), le coach n’a pas voulu que je prenne des risques. C’est juste voir comment je me sens. Je m’entraine donc juste pour enlever la fatigue de mon corps. Cinq fois 150 mètres, c’est juste relaxe.
Quelle sera la première compétition officielle de Ta Lou cette année ?
Normalement, je suis sensée commencer en avril avec le relais 4X100 mètres avec les filles à Los Angeles et peut-être faire un 200 m, mais on verra. Tout dépendra de comment je vais me sentir pendant la préparation. Si le coach m’estime apte à partir, à ce moment, je ferai les 200 mètres. Sinon, je ferais juste le relais avec les filles. En avril, ce ne sera pas véritablement une compétition. Pour moi, c’est une préparation surtout qu’après, il y a le 4×100 m avec le relais filles pour les championnats du monde aux Bahamas. C’est plus pour me préparer à ce rendez-vous.
Quelles seront les grandes articulations de votre préparation quand on sait que vous êtes déjà qualifiée pour les JO sur les 100 et 200m ?
Mon coach est mieux placé pour répondre à cette question. C’est lui seul qui sait ce qui me manque. J’ai déjà la vitesse et le talent, après il y a un petit couac qui arrive pendant les championnats et qu’on n’arrive pas à détecter. Je sais que je suis en forme mais pendant les championnats, il y a toujours quelque chose qui arrive. L’année dernière, j’étais sûr à 100% que j’allais ramener la médaille d’Or, car je savais ce que je valais. A l’entrainement, il y a beaucoup de choses ont manqué. C’est-à-dire, le temps de récupération entre la demi-finale et la finale. La demi-finale était encore plus difficile. Je ne peux pas dire que je ne me suis pas donnée à 100% mais après, j’ai 35 ans cette années, et je n’ai pas les mêmes moyens de récupération que les autres. Ça s’est joué sur ça. Le Président de la République m’apporte son soutien depuis 2022. Pareil cette année. Ce qui fait que je suis à mesure de payer mon physio à 100% tous les jours. Le président de la Fédération nous aide aussi et il fait ce qu’il peut. Après, ce qui manque surtout, ce sont les sponsors. Moi qui ai 35 ans j’ai besoin de travailler toujours sur mon physique et de beaucoup récupérer. Pour tout cela, il faut des moyens de récupération. Là, c’est bien, j’ai deux ou trois séances de physio chaque fois. Je mets tous les moyens de mon côté cette année parce que ce sont mes derniers JO. Je veux me donner à 100% pour terminer en beauté.
Aux JO 2016, vous tombez au pied du podium. En 2020, vous n’y arrivez pas également. Pour 2024, vous y allez en vous disant que vous avez une revanche à prendre ?
A force de dire qu’on prend une revanche, on est focalisé à prendre la revanche, et après on passe à côté de sa finale. Je travaille sur ce qui n’a pas marché. Je reste focus, je ne reste pas distraite mais focalisée sur ce qu’il y a à faire. Je ne suis pas trop excitée. J’essaie d’exécuter ce qu’on fait de bon à l’entrainement. Ce qui fait la différence, c’est l’exécution de la course et le finish aussi. Franchement dit, je ne me mets pas de pression. Advienne que pourra.
A 35 ans, ce sont vos derniers jeux comme vous dites. Vous l’aborderez avec quel objectif ?
Objectif podium, objectif médaille d’Or. Parce que je ne veux pas quitter ces derniers JO là sans avoir une médaille. Je sais qu’avec la course individuelle et avec le relais des filles, nous allons nous donner à 100%.
Parlant de relais, votre qualification se jouera aux Bahamas, vous y croyez vraiment ?
J’y crois. Je sais qu’avec les filles, c’est du talent. Après, comme on le dit un relais ce n’est pas une affaire d’avoir quatre filles fortes. C’est la cohésion, c’est le passage du relais. Moi j’ai la foi. Les filles elles sont hyper motivées et gonflées à bloc. C’est l’ambiance qui va prévaloir dans le groupe qui va nous donner cette motivation à aller chercher une médaille.
Après les JO, vous mettrez fin à votre carrière. Pour vos cadets qui suivent vos pas, un message ?
Tant qu’il y a la vie, il y a de l’espoir. Il ne faut pas se décourager. Moi, je sais d’où je viens. J’étais à un point où les gens doutaient de moi. Les gens disaient la petite fille qui vient de ‘’Koumassi 05’’ (un quartier de Koumassi) ne pouvait pas arriver à ce niveau où je suis actuellement. Aujourd’hui, je suis une des meilleurs athlètes au monde. En Afrique, je suis la meilleure et l’une des meilleurs athlètes au monde qui vient d’Afrique, ce n’est pas évident. En athlétisme c’est le haut niveau et faire partie des trois meilleures au monde, moi je dis que c’est un rêve qui est devenu réalité. Parce que quand je commençais l’athlétisme c’était pour faire plaisir à ma maman, lui montrer que je pouvais être une fille et réussir dans ce sport. Parce que pour elle, je devais être dans un bureau. J’ai voulu lui montrer qu’une fille pouvait faire ce travail.
…
A un moment donné, c’était de montrer aux yeux du monde que je pouvais venir de l’Afrique et être au top mondial. Je me suis sacrifiée en m’entrainant matin, midi et soir. J’ai regardé ce qui n’a pas marché pour m’améliorer. Et, la petite fille qui a commencé en 2008, qui s’entrainait deux fois dans la semaine, est devenue aujourd’hui cette star de renommée mondiale. C’est le travail qui a payé. C’est beaucoup de sacrifices, c’est ma foi en Dieu. Car il y a eu des moments où j’ai eu assez de pression, j’ai failli abandonner car j’étais beaucoup dépressive. Etre performant à 35 ans, ce n’est pas évident en athlétisme car c’est un sport de vitesse.
Il y a de l’autre côté, Traoré Checkna, Cissé Gue Arthur, Ismaël Koné, bref un relais4x100 hommes qui sera de feu. Je pense qu’au niveau mondial, vous allez les entendre partout. C’est une fierté pour moi de savoir que je vais bientôt à la retraite mais qu’il y a une jeunesse qui vient derrière. Il y a Jessika Gbaï, Koné Maboundou, et bien d’autres filles qui vont se faire connaître aussi. Battez-vous, soyez déterminés dans ce que vous faites et vous réussirez.
Réalisée par GMT et K. Michael
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