Vous revenez du Maroc où vous avez assisté à la CAN féminine organisée par le royaume chérifien. Tout le monde s’accorde à dire que cette compétition a été une réussite sur le plan organisationnel. Partagez-vous cet avis ?
Je crois qu’il faut féliciter le Royaume du Maroc, le président de la fédération royale marocaine de football (Fouzi Lekjaa, ndlr) et le peuple marocain qui ont bien voulu accueillir cette première édition de la CAN féminine à douze pays. Il faut dire que sur tous les plans, cette compétition a été un véritable succès. Pour preuve. Tous les acteurs notamment les équipes présentes ont relevé cette réussite. Jai eu à interviewer quelques acteurs dont le président de la fédération sud-africaine de football qui n’a pas tarit d’éloges envers le Maroc pour cette organisation parfaite. Cette bonne note vient d’une personnalité qui a organisé le Mondial en 2010. Cela veut dire que le Maroc a été à la hauteur de l’évènement. Nous avons vu des matches se jouer dans les stades pleins. Je pense que le Maroc a mis la barre haut.
Que pensez-vous du niveau de jeu lors de cette CAN ?
Le niveau de jeu était de qualité et tout le monde s’en est aperçu. Le Nigeria, onze fois champion d’Afrique, a été terrassé dès l’entame de la compétition par l’Afrique du Sud. Ce qui veut dire que le football féminin en Afrique évolue car les pays investissent de gros moyens financiers dans cette discipline. Je vous donne comme exemple le Maroc. J’ai eu la chance d’interviewer la présidente de la Ligue professionnelle marocaine qui m’a confié que la fédération paie mensuellement dans le compte de chaque joueuse évoluant dans la ligue la somme de 350 euros (environ 230 000 FCFA, ndlr). Le club employeur paie le supplément du salaire. Les joueuses évoluant en Ligue 2 touchent mensuellement la somme de 250 euros (environ 165 000 FCFA). Et les entraîneurs exerçant au niveau des clubs de la Ligue 1 touchent la somme de 850 euros (plus de 555 000 FCFA) quand leurs homlogues de la Ligue 2 émargent à 400 euros (plus de 260 000 FCFA). Les clubs paient le complément. Résultats des courses : en deux ans, le football marocain s’est transformé. Tout le contraire du football féminin ivoirien qui stagne depuis des années. C’est pour dire que le football féminin prend de l’ampleur et tous les pays doivent se mettre au travail.
L’Afrique du Sud remporte pour la première fois le tournoi. Cette couronne est-elle méritée pour la sélection sud-africaine selon vous ?
C’est un titre mérité pour les Banyana Banyana que je félicite pour ce sacre. L’Afrique du Sud disputait sa 6e finale avec une dose d’expérience face au Maroc qui était à son premier essai. La logique a été respectée mais je tire aussi mon chapeau aux Lionnes de l’Atlas pour leur parcours.
Comment expliquez-vous la chute des Super Falcons du Nigeria qui ont terminé à la 4e place comme en 2012 ?
C’est le résultat de la mauvaise gestion de la fédération de football nigériane sous le président Amaju Pinnick. C’est aussi simple que cela. Il y a des scandales financiers partout. Les primes des joueuses ne sont pas payées. Les sélectionneurs attendent plusieurs mois de salaire. Il y a eu vent de mouvement de grève lors de la CAN car ils doivent de l’argent aux joueuses. Et cela agit sur le rendement des joueuses qui sont passées à côté de leur CAN.
En marge de cette CAN 2022, il y a eu la cérémonie des Awards de la CAF qui a sacré le Sénégalais Sadio Mané comme le meilleur joueur africain de la saison. Ce couronnement était attendu pour vous ?
Ecoutez ! Je trouve même que c’est une injustice pour Sadio Mané. Il a remporté cette couronne en 2019 en Egypte. Après, il n y a pas eu de remise en 2020 et en 2021. Je pense que si les Awards avaient été organisés, Sadio Mané serait à son 4e trophée comme Eto’o Fils et Yaya Touré. Cela pour dire que cette distinction est méritée. Ils auraient dû faire un rattrapage au Maroc en cumulant les prix de 2020 et 2021 (rire). C’est une juste récompense pour ce qu’il a fait sur le terrain et ce qu’il pose comme acte en dehors avec les investissements qu’il fait dans son village de Bambali. Il est énorme. C’est un bel exemple. Il joue pour son village, il joue pour le Sénégal, il joue pour l’Afrique. Je lui adresse toutes mes félicitations.
Pour ce titre pensez-vous que la CAN remportée a été déterminant ?
Effectivement ! Le sacre a été déterminant. Il a fait des statistiques qui comptent pour lui et aussi il est qualifié pour le Mondial 2022 en étant décisif. Aujourd’hui, le Sénégal a fait une razzia lors de cette cérémonie et c’est mérité.
Aujourd’hui il y a l’affaire de la somme de 30 milliards FCFA qui aurait été demandée par la CAF contenu dans l’Accord-cadre que doit signer la Côte d’Ivoire pour accueillir la CAN 2023. Cette affaire fait beaucoup de bruits depuis quelques jours. Quelles analyses faites-vous de toutes ces informations qui circulent ?
Je peux vous dire que la mention des 60 millions de dollars ne vient pas de la CAF. En effet, lors de mon séjour au Maroc, l’information faisait déjà grand bruit. Et j’ai eu à discuter avec de nombreux membres du comité exécutif de la CAF. Dans l’ensemble, ils m’ont fait savoir qu’ils n’ont jamais été informés de l’existence d’un tel document et cela n’a jamais été discuté en réunion du comité exécutif et rien ne leur a été présenté. J’en déduis que cette somme est un montage entre le secrétaire général de la CAF et quelques autorités ivoiriennes dont le Ministère des Sports. Tenez-vous bien ! C’est la première fois depuis l’histoire de la CAN qu’au lendemain du coup de sifflet final de la compétition que le secrétaire général quitte le pays hôte pour le prochain pays d’accueil du tournoi. Et cela Veron Mosengo l’a fait. On n’a pas compris l’urgence de son voyage. Et quand il est arrivé, le Ministre des sports l’a immédiatement conduit chez le Premier Ministre. Et c’était ainsi lors de ses nombreux voyages au bord de la lagune Ebrié. Il a visité les infrastructures de la compétition sans même se faire accompagner par le Cocan où il n’a jamais les pieds alors que c’est le partenaire technique pour une bonne organisation de la CAN. Ce n’est vraiment pas son rôle. La CAF dispose des experts pour cette mission. Mais on a bien compris que tout cela avait pour objectif de déguiser sa présence. Aujourd’hui, on comprend la présence de ce budget de 60 millions de dollars introduit dans l’accord. Et il vient du secrétaire de la CAF. Je doute fortement que le président Motsepe même soit au courant de ce budget.
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Nos autorités avec à la tête le président Alassane Ouattara a accepté d’organiser cette CAN pour la jeunesse ivoirienne, pour la jeune africaine, pour le développement du pays. Pendant ce temps, il y a des gens qui veulent profiter de cela pour essayer de s’enrichir. Je pense qu’une enquête sérieuse doit être menée au niveau local et au niveau de la CAF pour situer les responsabilités sur cette affaire et sanctionner comme il le faut car c’est un fait grave.
Réalisée par Antoine Mahan
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